Village
Le spa comme refuge
Un bain de forêt, le contraste du chaud et du froid, le crépitement du feu, le silence et l’odeur de l’eucalyptus : autant de thérapies pour le corps et l’esprit.
Texte et photos—Catherine Bernier
En partenariat avec
On connait dorénavant les bienfaits du temps passé en nature, loin des technologies, pour la santé. La déconnexion demeure toutefois un exercice ardu pour la plupart d’entre nous. Même en randonnée, nous nous obstinons à garder notre téléphone tout près, question de documenter notre temps « hors ligne ». N’y a-t-il pas là un paradoxe évident ?
Peu d’endroits proscrivent les téléphones intelligents. Pour s’offrir un vrai répit, un nombre grandissant de gens se tournent vers les expériences d’hydrothérapie — en ville comme en nature. Les outils technologiques y sont interdits, certes, mais il y a plus que ça : la relaxation du corps, activée par l’alternance entre le chaud et le froid, amène inévitablement le cerveau à décrocher.

L’hydrothérapie ne date pas d’hier. Les Romains ont créé les premiers centres de cure thermale afin d’y pratiquer la sanitas per aqua (santé par les eaux). Au Japon, la culture des sources chaudes, qui subsiste encore aujourd’hui, est née au 8e siècle avec l’ouverture des premiers onsens. Au 11e siècle, la Finlande a inauguré à son tour une longue tradition de bains nordiques, qui inclut le sauna et la baignade en eau glacée. Un foyer finlandais sur deux est équipé d’un spa ou d’un sauna.
En Amérique, la sudation est un rituel important pour la santé et la spiritualité des communautés autochtones depuis des milliers d’années. L’hydrothérapie est toutefois beaucoup plus récente. Le Scandinave Spa à Mont-Tremblant est le premier établissement à offrir ce service au Québec. Fondé en 1999 par les entrepreneurs Pierre Brisson et Benoît Berthiaume, il est rapidement devenu un lieu prisé par les touristes et la communauté locale pour se ressourcer après une journée de ski, de randonnée, de vélo — ou de travail, tout simplement.
Sur le site, le silence est d’or, la déconnexion aussi. « Nous avons même cousu les poches de nos peignoirs pour garder les cellulaires à distance et maximiser les bienfaits de la déconnexion », confirme Allison Richard, directrice marketing du Scandinave Spa, qui a elle-même troqué sa vie effrénée à Paris pour le calme du mont Tremblant.

Il faut savoir que le stress nous rend fébriles : le cerveau se met à la recherche de dangers. Parfois, cette vigilance est justifiée, mais, de manière générale, elle est excessive. Les notifications sur nos téléphones intelligents font justement partie des microalertes qui génèrent une agitation inutile.
« Plus vous serez habité par un sentiment de sérénité, plus vos neurones vous tisseront discrètement un filet de sécurité », expliquent Rick Hanson et Richard Mendius, respectivement psychologue et neurologue, dans l’ouvrage Le cerveau de Bouddha. S’il est difficile d’accéder à cet état au quotidien, le spa peut jouer un rôle de facilitateur et devenir un « refuge » propice à la contemplation et à la détente.
Allison Richard
Directrice marketing du Scandinave Spa Mont-Tremblant
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Il y a quatre ans, Allison Richard et son conjoint obtenaient un visa de travail au Canada, sans jamais avoir mis les pieds au pays. La Parisienne, qui travaillait jusque-là pour des marques de chaussures de luxe, a troqué les tapis rouges du Festival de Cannes pour les tapis de neige des Laurentides.
«Au Québec, j’ai découvert la chaleur humaine et la culture du bienêtre. L’idée de la détente en nature n’existe pas à Paris; le stress est proéminent et transparait dans l’attitude des gens.»
Habiter la montagne a changé sa vie. Aujourd’hui, elle prend au moins une heure chaque jour pour marcher en forêt avec son chien, relaxer dans les bains ou descendre doucement une rivière en planche à pagaie. Un équilibre de vie plus sain qu’elle veut transmettre à son tour: «Je souhaite informer les gens sur les bienfaits de l’hydrothérapie, tant pour l’esprit que pour le corps. Il y a vraiment matière à créer du contenu pertinent — et cela m’anime profondément.» Pour la première fois dans sa carrière, Allison croit à ce qu’elle vend.

Philippe Langevin
Skieur acrobatique dans l’équipe nationale
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Pour Philippe Langevin, natif de Mont-Tremblant, le spa fait partie de la routine d’entrainement. À 17 ans, lors d’une coupe du monde en France, il est tombé et s’est déchiré le ménisque. L’incident ne l’a pas empêché de poursuivre sa course et d’arriver en deuxième place. Suivi par une physiothérapeute et un entraineur privé, Philippe a mis toutes les chances de son côté pour favoriser sa convalescence. «J’ai décidé par moi-même d’essayer la recette du Scandinave Spa [chaud-froid-repos]. Depuis, je viens toutes les semaines quand je ne suis pas à l’étranger.» L’athlète en retire des bienfaits physiques, certes, mais cela l’aide surtout à apprivoiser et à diminuer son stress lors des compétitions. Le jeune prodige s’estime heureux de vivre autant de sensations fortes au quotidien, mais il aura compris très tôt toute l’importance des temps de repos.
«Je pense toujours au ski, même en dormant. Quand je suis au spa, je fais le vide, je pratique des techniques de respiration. Ça transparait dans ma performance: je suis plus fluide dans mes mouvements.»

Joëlle Desrosiers
Fondatrice de CHAD communications
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Depuis la naissance de son plus jeune — Hubert a un an —, c’est la première fois que Joëlle Desrosiers, à la tête d’une agence de communications et de marketing, prenait un moment pour elle au spa. «J’ai la chance de bâtir mon propre horaire, mais cela m’amène à ne jamais vraiment m’arrêter.» Comme bien d’autres entrepreneur·e·s et parents en confinement, Joëlle conjugue plusieurs rôles sous un même toit. «Quand je viens au spa, je ne suis ni mère ni entrepreneure. Je suis juste bien, toute seule.» Elle admet ne pas ressentir un grand besoin de solitude en général, mais quand elle s’accorde ce petit luxe, elle en profite pour faire le ménage de sa charge mentale.
«Le silence est tellement rare dans ma vie que la simple diminution du bruit m’aide à clarifier mes idées. Le spa me fait le même effet que le camping.»
En nature ou au spa, Joëlle se permet de lâcher prise sur ce qu’elle s’impose à elle-même. Comme elle baigne dans les réseaux sociaux (son champ d’expertise), elle reconnait le poids des standards de l’univers virtuel. «La femme d’aujourd’hui doit non seulement démontrer qu’elle est performante au travail et à la maison, mais aussi prendre soin d’elle et avoir l’air reposée.» Joëlle y voit un paradoxe; c’est pourquoi elle apprécie la rigueur du Scandinave Spa quant à l’interdiction des téléphones cellulaires. «Ici, on n’a pas besoin de prouver à qui que ce soit qu’on est en train de relaxer!»
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L’expérience d’un bain extérieur, d’un sauna aux effluves d’eucalyptus ou d’un saut dans la rivière, sous les feuilles d’automne, peut tracer le chemin vers de nouvelles habitudes salutaires. Mais Allison nous suggère aussi de créer notre propre rituel à la maison : douche chaude, suivie de 15 secondes d’eau froide, puis méditation de 5 minutes ou plus. Malléable, le cerveau enregistre ces gestes positifs, dont les bienfaits sont immédiats. Que ce soit dans le confort d’un spa ou dans l’intimité de notre salle de bain, l’essentiel est de nous entrainer à la détente, pour regagner en sérénité. ■
Le Scandinave Spa Mont-Tremblant est une institution dans l’industrie du tourisme de détente au Québec. Situé au cœur de la forêt laurentienne, il côtoie les abords de la rivière du Diable. Il a été conçu de façon à offrir aux visiteurs et aux visiteuses une réelle proximité avec la nature, à chaque étape de l’expérience : bains chauds tourbillons, chutes et bains froids, espaces de relaxation intérieurs et extérieurs, accès à la rivière, massages thérapeutiques, et saunas secs et humides. Le groupe Scandinave Spa possède trois établissements — à Whistler, en Colombie-Britannique (2010), à Montréal, au Québec (2009) et à Blue Mountains, en Ontario (2006).
Rédactrice et photographe indépendante, Catherine Bernier est aussi diplômée en psychologie de l’orientation et en méditation. Originaire de Sainte-Flavie, en Gaspésie, elle cultive un lien privilégié avec l’océan et les territoires sauvages.