Gaëlle Elma

Enracinée dans l’intimité des corps

Cet article fait partie du Dossier Vies noires, espaces verts.

Née à Haïti et maintenant installée à Montréal, la photographe Gaëlle Elma revisite les perceptions des corps racisés avec des images ancrées dans la vulnérabilité et la douceur de la nature. En ressort des portraits à la signature authentique d’un univers en suspens où le sujet est à l’abri des mécaniques sociales externes.

D’où est né ton intérêt pour la photo?

Mon amour pour la photographie a toujours été présent, mais j’avais 18 ans quand j’en ai vraiment pris conscience. Je venais de quitter mon foyer d’accueil et je me cherchais. Je me demandais qui était vraiment Gaëlle Elma. J’essayais de me retrouver après avoir passé beaucoup de temps à m’effacer, pour plaire.

Quelle(s) photo(s) ou quel(s) photographe(s) t’ont le plus influencée?

Il y en a plusieurs, mais la personne qui me vient souvent à l’esprit est Garciela Iturbide. Une photographe, artiste et grande rêveuse mexicaine. On s’attache aux photos de Iturbide, parce qu’on a l’impression qu’elle nous raconte la plus belle des histoires.

Qu’est-ce que tu aimes le plus de l’eau comme décor pour tes portraits?

L’eau symbolise tellement de choses pour moi: la liberté d’être vulnérable, la sécurité, le lien avec la nature et notre Terre Mère. Quand je suis dans l’eau ou entourée d’arbres, je me sens enveloppée de chaleur et d’une protection maternelle. Je me sens comme à la maison.

Est-ce que ton regard sur la photo, tes sujets ou le décor de tes images ont changé avec le contexte actuel et les mouvements de protestation BLM à travers le monde?

Non. Mon regard unique et personnel en tant que femme noire n’a pas changé. C’est le regard de certaines personnes autour de moi qui a changé. Elles commencent à me voir, moi et ma pigmentation, ce qui est positif, car avant elles ne voyaient pas ma couleur de peau. On ne me voyait pas.

Que cherches-tu à capter chez les sujets que tu choisis?

J’aimerais que mes sujets n’aient pas peur de l’intimité — et d’être vulnérables. Que ce soit avec eux-mêmes ou avec les gens qui les entourent.

Y a-t-il une histoire ou un lieu photographié qui t’ont particulièrement marquée?

Oui. Quand je suis arrivée à Montréal, j’ai contacté une fille via Instagram. Nous avons fait deux heures de bus pour nous rendre à la plage du Cap-Saint-Jacques. Cette journée-là, je voulais prendre des photos d’une fille qui était fière de son corps et de ses cheveux. Une fille qui s’assume et qui marche la tête haute. Une fille que je voulais désespérément être. Cette séance et cette plage m’ont tellement marquée que j’ai ensuite commencé une série de photos dans l’eau. Cette série est encore en développement.

Qu’aimerais-tu communiquer aux gens qui regardent tes photos?

J’ai commencé la photo pour combler un vide, et essayer de me comprendre. Mes photos sont le miroir de ce que je vis et ressens quotidiennement. C’est pour cette raison que je n’ai pas d’attentes envers les gens. Juste reconnaissante qu’ils prennent le temps de regarder mes photos.

Sur quoi travailles-tu en ce moment?

Sur moi.

Trois comptes Instagram qui t’inspirent plus particulièrement?

@biancadjardins pour la douceur de ses photos.
@artxayiti pour le talent qui se trouve dans mon pays et dans sa diaspora.
@durimel pour sa lumière.

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