La petite histoire de BESIDE

Cinq ans de doutes et de feux de joie. Cinq ans de projets un peu (beaucoup) fous et d’êtres humains passionnés. Cinq ans de chemins imparfaits, qu’on n’échangerait pour rien au monde.

Texte—Eliane Cadieux & Jean-Daniel Petit

12 novembre 2016 — 23h34

Nous sommes arrêté·e·s au poste frontalier du Montana, entre le Canada et les États-Unis. Dans notre VR blanc et rouge, une tonne de marchandises non déclarées.

Douanier : What’s the purpose of your trip, business or pleasure ?

Conducteur : Pleasure.

Douanier : Do you carry drugs or illegal arms ?

Conducteur : No sir.

Douanier : Have you or any of the passengers been arrested before ?

Conducteur : No sir.

Douanier : Are you carrying illegal items ?

Conducteur :

Douanier : Fruits, vegetables, tobacco ?

Bien droit sur le siège du conducteur, Jean-Daniel, cofondateur de BESIDE, lance un regard à Julien, réalisateur. Ce dernier ouvre le frigo et en sort les fruits défendus : limes, avocats, tomates, coriandre.

En les remettant au douanier, Julien lui demande :

« Are you going to make guacamole, sir ? »

Après un silence soutenu, le douanier donne sa bénédiction en riant :

« Have a great trip guys. »

À l’automne 2016 — deux mois après avoir officiellement lancé notre compagnie —, nous avons rempli un VR de magazines et traversé l’Amérique du Nord d’est en ouest pour les distribuer nous-mêmes. Pas pour le plaisir, mais pour survivre.

Ce voyage a changé nos vies.

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La genèse
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Guillaume Leblanc et Jean-Daniel Petit ont grandi dans le même village, en Abitibi-Témiscamingue. Ils ont vécu le passage de l’enfance à l’adolescence ensemble, les parties de hockey dans la rue comme les soirées en skateboard au parc.

Puis, leurs choix de carrière les ont menés dans différents coins du pays. Le premier est allé étudier l’ingénierie et travailler dans les sables bitumineux de l’Ouest canadien. L’autre a opté pour le milieu du design et de la publicité à Montréal.

Quinze ans se sont écoulés. Guillaume arrivait au bout de ce premier parcours, avec l’impression de s’être perdu en cours de route. Quant à Jean-Daniel, il avait envie de retrouver les lacs et les forêts de son Abitibi natale. Sur un coup de tête, Guillaume avait récemment racheté les moules de canots et de kayaks d’une manufacture en faillite de New LisKeard, en Ontario, dans le but de la redémarrer en bordure de Rouyn-Noranda. Sans trop savoir comment s’y prendre.

Quand le téléphone a sonné, plutôt que de prendre peur, Jean-Daniel a vu dans la proposition de Guillaume une occasion de donner du sens à leurs vies respectives et d’avoir un impact positif sur leur communauté. Quelques instants plus tard, le nom du projet était né : abitibi & co.

***

Eliane Cadieux a grandi dans un coin agricole des Cantons-de-l’Est. C’est sûrement de là que lui vient son goût du beau, de l’architecture, du vélo et de tout ce qui touche à l’herboristerie. Elle s’est ensuite rendue à Sherbrooke, à Montréal et en Italie pour étudier le design graphique.

Lors d’une journée portes ouvertes à Montréal, sa mère a insisté pour qu’elle visite un jeune studio de branding dans le nord de la ville, Elliot, cofondé par Jean-Daniel.

« J’ai essayé de ne pas m’inquiéter avec le fait qu’il était situé au-dessus de la Poubelle du ski — un gros contraste avec les agences du Vieux-Port », se remémore Eliane, cofondatrice et directrice de création de BESIDE.

Cette rencontre l’a finalement charmée — sa mère aussi —, et ç’a été le point de départ de 12 années de collaboration entre Jean-Daniel et Eliane. Ensemble, il et elle ont travaillé sur une bonne centaine de projets, dont plusieurs en agence. Et, bien entendu, quand Jean-Daniel et Guillaume ont cofondé abitibi & co il y a sept ans, ils ont tout de suite pensé à Eliane pour créer l’identité visuelle de la marque.

Le trio de fondateur·rice·s de BESIDE était né.

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– 2016 –

La naissance de BESIDE

abitibi & co. s’adressait davantage aux amoureux·euses de la nature qu’aux expert·e·s en pagaie. À ceux et à celles qui désiraient se retrouver seul·e·s sur un lac brumeux avec leur chien, accéder à une paroi d’escalade par les voies navigables, ou encore partager un weekend en famille sur une ile.

Malgré le succès de l’entreprise, le trio a vite constaté qu’il serait difficile de faire rayonner son système de valeurs en fabriquant et en distribuant quelques centaines d’embarcations par année.

Jean-Daniel, Guillaume et Eliane ont donc cherché une idée qui dépasserait les limites du plein air et du mouvement environnementaliste. En plein questionnement, ils et elle ont rencontré Hélène Philion — anciennement directrice générale du Groupe Chlorophylle, maintenant accompagnatrice stratégique (et bientôt associée et responsable du développement humain) chez BESIDE.

C’est là qu’est apparue l’idée de créer un nouveau média indépendant. Un fil rouge capable d’attacher toutes ces réflexions dans un seul et même lieu, baigné de design, de nature et de culture.

Cet endroit prendrait d’abord la forme d’un objet : un magazine imprimé.

Vive les cartes de crédit
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« Faire de l’édition imprimée, c’est un hobby, pas une entreprise viable. »
« Le marché est en déclin, voire en chute libre. »
« Quel bon timing pour lancer un magazine imprimé… Not ! »

La réception a été unanime, et peu encourageante.

Avec raison. Les magazines s’appuient traditionnellement sur un modèle de revenus publicitaires qui commande de créer un produit à gros tirage pour les annonceurs, plutôt que pour le lectorat. Rares sont les publications qui réussissent à s’en sauver.

Pour BESIDE, l’ambition était plutôt de créer un magazine pertinent et attrayant destiné à une communauté intelligente, avisée et curieuse à travers l’Amérique du Nord — et ce, sans publicités traditionnelles.

Notre trio ne se doutait pas que pour ce faire, il devrait littéralement inventer un nouveau modèle de financement et de distribution. Car se lancer dans la production d’un magazine équivaut à se faire déserter par les institutions bancaires. Créer une publication de qualité est un processus long, onéreux, et plus ou moins rentable à court terme.

« Personne n’y croyait, mais nous étions convaincu·e·s qu’il y avait du mérite à faire les choses autrement, à réinventer un modèle brisé. Nous avons donc combiné nos cartes de crédit pour financer la production du premier numéro », raconte Jean-Daniel.

Plus qu’un nom, une marque
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Le mot BESIDE signifie à la fois la face B (B-Side) et la marge (beside).

Le B-Side est un terme issu de l’industrie de la musique. À l’époque, les titres les plus populaires se retrouvaient sur la face A (A-Side) des vinyles et des cassettes, tandis que la face B (B-Side) recelait les plus beaux trésors, les morceaux moins connus, à apprivoiser. « All Apologies », de Nirvana, figurait par exemple sur la face B de In Utero.

Avec BESIDE, nous voulions devenir la face B des médias traditionnels. La face B de notre industrie. La chanson que l’on découvre sur le tard et qui nous amène à comprendre l’album différemment.

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BESIDE, c’est aussi être « en marge ». En marge de l’instantanéité, des discours polarisants et des systèmes qui nous mènent tout droit dans le mur. C’est explorer des voies alternatives, prendre le temps de réfléchir et poser un regard différent sur le monde.

Cette marge fait partie intégrante de notre ADN, de notre univers graphique, de notre ligne éditoriale et de notre façon de gérer notre entreprise.

Une éditrice en or
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Faire un beau magazine, c’est une chose; le faire avec une ligne éditoriale forte et pertinente, c’en est une autre. Visant les standards de qualité les plus élevés, Jean-Daniel a décidé de rencontrer l’équipe d’Atelier 10, qui produit le magazine maintes fois primé Nouveau Projet.

« Je voulais travailler avec les meilleur·e·s. Le contenu est au cœur de notre mission, et je voulais qu’il soit à la hauteur de la marque et du design », souligne Jean-Daniel.

Jusque-là, seul·e·s Eliane et lui travaillaient sur le projet, de soir et de weekend. L’embauche d’Atelier 10, pour donner le coup d’envoi au magazine, lui confèrerait crédibilité et profondeur. Malgré la pile de mandats qui trônaient déjà sur sa table, l’entreprise a désigné une rédactrice en chef qui se consacrerait à ce nouveau projet. Catherine Métayer venait de passer une décennie à travailler dans les bars à vin de Brooklyn et aux Nations Unies à New York; elle avait aussi obtenu une maitrise en publishing à Londres et fait un petit crochet en Asie. La création d’une publication bilingue, à la croisée de la nature et de la culture, représentait tout ce dont l’éditrice — et aujourd’hui associée chez BESIDE — rêvait pour reposer son ancre à Montréal.

Se sont ensuivis huit mois à bâtir une talentueuse équipe de collaborateur·rice·s et à brasser des idées pour trouver LA bonne approche. Huit mois à jouer avec un Rubik’s, dans une myriade de cafés montréalais, avec un faible pour la lumière et les sandwichs du Pista sur Beaubien.

Réinventer le modèle
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Pendant ce temps, les cartes de crédit continuaient de rougir. Jean-Daniel cherchait toujours une solution de rechange à la publicité traditionnelle. Il a finalement misé sur l’approche d’un partenaire proche des valeurs de BESIDE, avec qui créer du contenu honnête et pertinent pour le lectorat.

C’est ainsi qu’au lieu de réserver 50% du magazine à une vingtaine d’annonceurs, BESIDE a signé un seul partenariat pour son premier numéro. Avec la Sépaq, qui collabore toujours avec nous, cinq ans plus tard.

Mais comme ce modèle d’affaires ne suffisait pas à couvrir tous les frais de production, l’espoir reposait sur le soutien de lecteur·rice·s. Il fallait donc nous assurer de livrer un produit à la hauteur de la vision. La qualité de l’impression devrait refléter le contenu. Ce n’était certainement pas là que nous épargnerions.

Depuis son tout premier numéro, BESIDE est donc imprimé chez L’Empreinte, sur du papier 100% postconsommation de Rolland. L’imprimeur a toujours cru en notre jeune équipe, aussi petite fût-elle à l’époque.

« Je me rappelle mon premier appel avec Luc Janson, associé chez l’Empreinte. S’il acceptait de nous aider pour le premier numéro, je lui jurais fidélité pour les cinq suivants », poursuit Jean-Daniel.

Cinq ans et dix numéros plus tard, nous voici.

Avec le même imprimeur et le même modèle de partenariats.

Distribution, distribution, distribution
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« You clearly don’t understand how this industry works… We don’t care about you or your magazine, I’ll let you go, little bugger. »

C’est ainsi que la conversation téléphonique avec une grande compagnie de distribution s’est terminée et que la toute première tentative de contrat a échoué, avant même d’avoir pu commencer.

Sa promesse était de distribuer BESIDE dans plusieurs milliers de points de vente partout en Amérique du Nord. Elle prévoyait d’écouler environ 30% des stocks, de prendre 50% des revenus et d’envoyer les invendus au recyclage, sans aucun droit de retour. A fair deal, quoi!

La plupart des magazines acceptent pourtant de travailler avec les grands distributeurs. Mais il ne fallait pas être actuaire pour calculer qu’avec ce modèle — et sans revenus publicitaires —, la faillite de BESIDE était imminente.

C’est à la suite de cet appel, en aout 2016, que nous avons décidé de prendre un chemin de travers.

« Sur un coup de tête, on a cherché le moyen d’imprimer le nombre exact de ventes projetées, pour réduire notre empreinte environnementale et éviter le gaspillage généré par la distribution traditionnelle », explique Jean-Daniel.

En deux temps trois mouvements, l’équipe a pondu une campagne Kickstarter, qu’elle a filmée dans le garde-robe de l’appartement de Catherine, en pleine canicule.

L’objectif premier était de récolter 5 000$. Après seulement un mois, nous cumulions plus de 21 849 CA$ en préventes, avec 586 personnes qui soutenaient le projet.

Les 586 tapes dans le dos les plus énergisantes qui soient. Nous n’étions plus seul·e·s.

Recevoir une cargaison de magazines chez soi
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Le camion venait de déposer les palettes de magazines devant la porte de Jean-Daniel, dans Hochelaga.

Lui, Eliane, Catherine et le nouveau stagiaire, Maxime (qui ne savait pas trop dans quoi il s’embarquait), ont transporté les boites au sous-sol, une à une. Installé·e·s sur le plancher, ils et elles ont préparé les 586 envois postaux de la campagne Kickstarter.

586 magazines, dans 586 enveloppes, avec 586 mots de remerciement écrits à la main.

De l’excitation dans le regard, et de la broue dans le toupet.

Le premier lancement
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Dix mois que le trio s’activait dans ce 5 et ½ transformé en maison d’édition. Il était plus que temps de lancer le magazine en grande pompe, de rencontrer les 586 visages qui croyaient en nous et de festoyer enfin.

C’était le 20 octobre 2016 dans une petite rue du Mile End. Nous avions oublié les bruleurs pour les S’Mores, la gommette ne valait rien et les affiches décollaient des murs. Rapidement, le stress de la salle vide a été remplacé par le stress du manque de place et d’alcool. Et par le bonheur indélébile de voir nos proches et des centaines d’inconnu·e·s échanger comme dans un bon party de famille.

Photo: Baron Mag
Photo: Baron Mag
Photo: Baron Mag
Photo: Baron Mag

Ce soir-là, un dénommé Nicolas s’est improvisé barman, un titre qu’il prenait très au sérieux puisqu’il s’assurait régulièrement de tester lui-même son produit. Nous étions encore loin de nous douter qu’il deviendrait notre directeur financier quelques mois plus tard. Derrière son regard flou se cachait l’esprit aiguisé d’un comptable de brousse.

Pour clore la soirée, nous avons annoncé ce qui marquerait la suite de BESIDE :

« Afin de surmonter les enjeux liés à la distribution, nous avons loué une van avec laquelle nous traverserons l’Amérique du Nord — de la Nouvelle-Écosse à la Californie. Nous irons rencontrer les détaillants nous-mêmes. »

Cris.
Applaudissements.
Sourires.
Cheers.
Extase.

Le gout de mourir de stress.

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Le roadtrip
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Ou l’art de vivre 30 jours dans 150 pi2 avec 4 inconnu·e·s

BESIDE RECHERCHE :
Réalisateur-ninja pour projet de roadtrip coast to coast. Expérience dans le monde de la guacamole, un atout. Durée du voyage : 30 jours. Écrivez-moi en privé !

La publication Facebook a été lancée comme une bouteille à la mer, dans l’espoir que l’algorithme fasse son œuvre.

C’est lors d’un café avec Bernard Côté, ancien directeur marketing de MEC, que l’idée du roadtrip était née, quelques semaines plus tôt. Une bulle au cerveau provoquée par le petit espresso.

La vérité, c’est que sans la vente d’au minimum 5 000 exemplaires, ce magnifique projet pouvait crasher aussi vite qu’il avait décollé. Le roadtrip était notre bouée de sauvetage en haute mer.

Nous n’avions peut-être aucun partenaire de distribution viable et aucun budget de marketing, mais nous avions beaucoup de volonté dans nos sacs à dos.

 

En fin de compte, l’équipage serait composé de cinq personnes :

Ninja 1: Julien Robert, réalisateur
Ninja 2: Elise Danielle, productrice
Ninja 3: Catherine Bernier, rédactrice-photographe
Ninja 4: Eliane Cadieux, préposée au GPS et au café
Ninja 5: Jean-Daniel Petit, mojo officer

La fin de l’automne comporte son lot de défis : les terrains de camping fermés, les très chics stationnements où l’on pense pouvoir dormir et les réveils brutaux par la police au beau milieu de la nuit; le gel, le manque d’eau et d’essence, les tempêtes de neige et la difficile gestion des batteries, entre autres.

Malgré tout, pour nous, le temps était tout sauf gris. Notre route a été ponctuée de rencontres extraordinaires, qui ont donné un sens à notre mission.

Pendant que nos prospecteur·rice·s (les ninjas 1 à 5) allaient à la rencontre de notre communauté en devenir, Catherine et Maxime appelaient tou·te·s les libraires du bottin, de même que les propriétaires de boutiques ou de cafés de quartier, dans l’espoir de trouver de nouveaux endroits où distribuer notre magazine.

Après 30 jours sur la route et 1 000* appels, nous avons réussi à confirmer plus de 150 détaillants indépendants et à écouler nos 8 000 exemplaires.

BESIDE était en vie. Il avait désormais la légitimité d’exister.

*À noter que ce chiffre est le seul qui n’a pas pu être confirmé.

– 2017 –

Le laboratoire

Après avoir laissé passer les Fêtes pour voir nos proches et redescendre un peu sur Terre, nous avons statué qu’il était temps de suivre la demande et de pousser BESIDE plus loin. De transformer le magazine en média, et même en écosystème multiplateforme.

Nous avons aussi troqué l’appartement de Hochelaga pour un petit local de 500 p2 dans le même quartier, car, mine de rien, l’équipe s’était agrandie. Neuf beaux humains — Vincent (directeur des partenariats) et Geneviève (directrice évènementielle) avaient récemment sauté dans l’aventure — et trois chiens cohabitaient dorénavant avec des magazines, de l’équipement de plein air et une moto, entreposée en pleine cuisine.

Dans une bonne journée, il y avait en simultané des appels et des réunions dans les toilettes et la salle ouverte, sur le perron de l’entrée et les trottoirs qui enlaçaient le bureau.

Documentaires, reportages, balados, évènements, ateliers, partenariats : nous étions incroyablement agiles et investi·e·s. La création était libre, dénuée d’influences externes. Nous étions à la recherche de notre ADN; nous voulions aussi trouver un modèle d’affaires capable de nous rapprocher collectivement de la nature, tout en restant indépendant·e·s et cohérent·e·s dans chacun de nos gestes.

 

Mais il fallait quand même payer les factures…
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La réalité est difficile pour tout média. Les revenus publicitaires fondent comme neige au soleil au profit des GAFA; le contenu de qualité demande du temps, du talent et de l’expertise. Sans un seuil critique d’abonné·e·s, de ventes publicitaires ou de revenus alternatifs, il est extrêmement ardu d’être rentable.

Malgré tout, il était inconcevable pour nous de prendre la direction d’un modèle intrusif. Il fallait tout faire pour protéger la qualité de notre contenu, notre indépendance et notre communauté.

C’est pourquoi, durant les trois premières années de BESIDE, nous avons puisé dans nos anciennes vies pour proposer un service d’agence stratégique et de création de contenu. Nous voulions offrir notre expertise à des clients complémentaires, en qui nous croyions et avec qui nous partagions un même système de valeurs.

A-Side — la face A, la face commerciale — nous a fourni le temps d’incubation dont nous avions besoin. En parallèle, nous multipliions les heures pour poursuivre l’exploration d’un nouveau modèle et la construction de nos fondations.L’année 2017 nous aura permis de nous forger un noyau solide de résilience et d’expérience.

Deux nouveaux numéros ont vu le jour, en plus de notre plateforme numérique beside.media. Et nous avons reçu nos premiers honneurs : un prix Grafika et une nomination aux Prix du magazine canadien.

– 2018 –

L’incubation

Deux ans après notre naissance, notre vision et notre terrain de jeu se clarifiaient.

Le pont entre l’humain et la nature, c’était la culture sous toutes ses formes : art, architecture, cuisine, science, entrepreneuriat, notamment. Un lien intangible mais palpable, un moyen de communication infini, le fil rouge par lequel se transmettaient des connaissances et des expériences.

Cette année-là, nous avons voyagé, tel·le·s des adolescent·e·s dans la fleur de l’âge, pour alimenter notre créativité et mettre nos idées à l’épreuve.

Un premier séjour au Colorado a permis à Jean-Daniel et à Vincent de rencontrer les acteur·rice·s de l’industrie au Outdoor Retailer Show. Plutôt qu’une traditionnelle chambre d’hôtel, ils ont partagé un petit Airstream à distance de marche du centre de congrès et de multiples pubs.De leur côté, Catherine et Eliane sont parties en Suisse, en Allemagne et en Espagne, les mecques du magazine; elles voulaient trouver matière à repenser le branding et la ligne éditoriale de BESIDE. Elles en ont ramené une collaboration avec l’éditeur de coffee table books par excellence : gestalten.

Finalement, Eliane et Jean-Daniel sont monté·e·s plus au nord que jamais, en Finlande. Leur séjour leur a permis de préparer un dossier de contenu pour le magazine, mais aussi de comprendre comment les Finlandais·es vivent leur nordicité et comment l’architecture a un impact sur leur mode de vie.

Pendant ce temps, de nouveaux et de nouvelles joueur·euse·s étoiles se greffaient progressivement à l’équipe : Olivier (directeur des produits numériques), Camille (directrice de la stratégie), Caroline et Mark (rédacteur·rice·s en chef adjoint·e·s). Et, bien que nous soyons tissé·e·s serré, le feeling de boite de sardines grandissait de plus en plus.

Un trou dans le mur plus tard, notre bureau s’était bonifié de 2 000 pi2 supplémentaires. L’équipe a empoigné pinceaux et marteaux pour transformer ce nouvel espace en un milieu de travail à son image, tout en bouclant son premier livre : Écrans verts.

– 2019 –

La mise à l’épreuve 

« Sergioooooo!!! Ça coule, vite, ça coule, le plafond coule partout! », s’est écrié Eliane un matin, les bras pleins de chaudières, à notre nouveau directeur des partenariats.

 

Le sentiment de collégialité était assez fort pour nous faire oublier la toiture qui fuyait et le fait que nous habillions notre équipement informatique avec des tentes de camping. Notre équipe se développait, les projets s’accumulaient, BESIDE prenait racine, mais notre réalité était bel et bien celle d’une startup encore en mode bootstrap.

 

Ajouter un festival BESIDE on the side
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En 2019, l’équipe a aussi eu l’idée de donner vie au magazine sous la forme d’un festival avec musique, ateliers, activités de plein air et camions de cuisine. Le temps d’un long weekend de juin — et d’un mélange déroutant de pluie, de soleil et de nuages —, nous avons accueilli 6 000 personnes aux iles de Boucherville.

Nous nous sommes métamorphosé·e·s en :

  • Bâtisseur·euse·s de chapiteaux
  • Installateur·rice·s de signalétique
  • Agent·e·s d’artistes
  • Conférencier·ère·s de brousse
  • Pelleteur·euse·s de boue
  • Épandeur·euse·s de foin

L’aventure nous aura permis de travailler avec des perles d’humains : Laurie, Audrée, Justine, Marie Charles (productrice au contenu et dorénavant mojo officer, en remplacement de Jean-Daniel) et plusieurs autres.

Bref, une belle folie qui mériterait son propre chapitre dans la grande histoire de BESIDE.

Réinventer le modèle (bis)
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« Vous devriez faire des tasses à l’effigie de BESIDE. »

Cette proposition a été lancée par un ami de Jean-Daniel dans un bar d’Hochelaga. Et parce que le cofondateur de BESIDE doutait fort que nos armoires et nos fils Instagram aient besoin d’une tasse de plus, il lui a répondu du tac au tac :« Si jamais BESIDE crée un produit dérivé, ce sera une cabin dans le bois. »

L’idée est sortie de sa bouche comme si elle mijotait depuis des années. Elle devait dormir à l’intérieur de lui, quelque part entre l’attrait du retour en nature et la peur de l’échec entrepreneurial.

Pourtant, quand ces deux syllabes sont sorties, ca-bin, c’était comme si tous les morceaux du casse-tête venaient de s’imbriquer. Jean-Daniel voyait déjà la communauté BESIDE autour d’un feu, au diapason de la nature ambiante.

***

Plusieurs mois auparavant, Jean-Daniel était allé cogner à la porte de son ancien employeur — aussi entrepreneur et gestionnaire accompli —, Jean-François Bouchard. L’objectif était de trouver un mentor qui pourrait l’aider à réfléchir à vol d’oiseau.

La première rencontre a ouvert la voie à des sessions de travail bimensuelles, consacrées à dénouer le modèle d’affaires de BESIDE. Avec la diversification des activités — média, évènements, e-commerce, agence de production —, tous les scénarios menaient à un mur. Le mur des valeurs, celui de la mission ou celui de la rentabilité.

Le seul modèle qui a finalement collé impliquait de miser sur l’indépendance du média BESIDE et de nous diversifier en utilisant l’immobilier pour protéger le territoire. Cette idée était juste assez folle pour que nous la considérions, et juste assez improbable pour que nous soyons la première marque média à l’adopter.

Les mois suivants ont été consacrés à transformer cette idée de coin de bar en un plan réaliste. Et, petit à petit, ce plan dessiné au marqueur sur une vitre s’est transformé en une série de to-dos.

Le premier terrain
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« Je ne vois plus le drone… Ramène-le… Brrrrrrrrr#$%?!&! »

Ceci a marqué le décès du deuxième drone de l’histoire de BESIDE. Nicolas, notre barman devenu directeur financier, et Jean-Daniel se trouvaient dans la région de Lanaudière, où ils cherchaient à implanter le premier Habitat BESIDE. Or, malgré le sacrifice du drone, ce terrain n’était pas la terre promise. Quelques jours plus tard, en scrutant religieusement les sites de terrains à vendre, l’équipe est tombée sur une vidéo de Jacques Côté, fier propriétaire d’une terre lanaudoise qu’il chérissait depuis plus de 25 ans.

Nicolas et Jean-Daniel se sont alors dépêchés de manifester leur intérêt.« Si vous me prouvez que vous avez la capacité financière d’acheter, vous pouvez venir la visiter demain », leur a lancé l’agent d’immeuble.

Deux, trois pirouettes et hop, une preuve de fonds débloquait la visite du futur terrain BESIDE, soulignée par la première neige de l’année, en plein mois de novembre.

Même pris sur les routes de terre avec les VTT, Jean-Daniel et Nicolas ont vécu la beauté du territoire comme un coup de foudre.

C’était LE terrain.

S’est ensuivi un chemin de croix de deux ans : planification, démarchage, règlementation, financement, lotissements, conseils municipaux, plans d’architecture, optimisation…

En parallèle, l’équipe travaillait encore dans le bureau balnéaire avec des chaudières aux côtés des ordinateurs pour récupérer les pluies constantes qui chutaient du plafond. C’était le temps de nous trouver une nouvelle maison !

Nouvelle maison, nouveau souffle
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« Devant un parc, avec de grandes fenêtres, une terrasse, des bureaux fermés et des zones ouvertes, dans Villeray ou Rosemont. »Tels étaient les souhaits de l’équipe.

Aim for the moon, qu’ils disent.

Mais ce qui devait relever du miracle s’est finalement présenté à nous dans un alignement d’étoiles. Un beau bureau conçu par la firme d’architectes Nature Humaine, avec une grande terrasse face au parc Molson, rue Beaubien. À la suite de la signature du bail, nous nous sommes pincé·e·s pour être certain·e·s que ce n’était pas un rêve.Ce nouvel espace — que nous avons baptisé Le Soufflet — nous a apporté un sentiment de confirmation. Comme si nous sentions que BESIDE était bien ancré dans son milieu, que nous avions pris racine pour rester et traverser les défis à venir.

C’est là, dans ce nouveau lieu, que nous avons concocté nos magazines 08 et 09.

C’est aussi là que nous avons créé notre deuxième livre, The New Traditional, imaginé un an plus tôt avec gestalten à Berlin, entre un Apérol spritz et un tour de vélo. Un livre qui serait distribué dans plus de 80 pays.

– 2020 –

Quand le monde s’arrête

Ça faisait à peine quatre mois que nous étions installé·e·s dans le nouveau bureau quand la pandémie s’est pointée.

La chaine de bicycle mondiale venait de débarquer.

Évidemment que les premiers instants ont été inquiétants, voire paniquants.

Est-ce que nos familles, ami·e·s, collègues sont en sécurité ?
Qu’est-ce qui va se passer avec nos vies et nos projets ?
Combien de temps allons-nous nous confiner ?

Le manuel pour gouverner son petit voilier de PME à travers les vagues pandémiques n’était pas offert en librairie.

Rapidement, nous nous sommes regroupé·e·s pour établir un plan de contingence et nous préparer au pire.

C’est à ce moment précis que la mission de BESIDE, un peu campée dans le futur, a été catapultée dans le présent. Le retour à l’essentiel, à la nature, à nos communautés, à l’alimentation locale; l’importance de repenser nos milieux et nos modes de vie, notre rapport au temps, aux autres, à notre environnement…

Rapidement, nous avons senti un vent de solidarité. Une grosse dose de confiance et d’amour qui nous a permis d’envoyer des milliers de magazines aux quatre coins de l’Amérique du Nord, de donner la parole à nos collaborateur·rice·s et à notre communauté à travers des lettres de quarantaine, de lancer un projet immobilier malgré la crise. Nous avons d’ailleurs atteint, au cours de la dernière année, les 100 000 exemplaires vendus.

Les 12 premiers mois de pandémie auront aussi marqué l’arrivée de 14 nouveaux visages chez BESIDE : Stéphane, Nicholas, Elisabeth, Charles, Alix, Josée, Andréa, Corinne, Gabrielle, Jo-Annie, Marie-Ève, Félix ainsi que deux Catherine.

Nous faisons partie des privilégié·e·s.

 

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Merci à vous, lecteurs et lectrices, de nous offrir le privilège de faire partie de vos vies.

Nos cinq premières années ont été une aventure extraordinaire.

Et nous avons le sentiment que ce n’est que le début.

Comme quoi les chemins imparfaits en valent la peine.

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