Créer un paysage vivant chez soi

Vous aimez les plantes d’intérieur? Vous êtes peut-être prêt·e à passer au niveau supérieur et à entretenir une forêt pluviale miniature sous verre.

Texte—Jade Prévost-Manuel
Photos—Indra Prasetyo

Il y a six ans, Indra Prasetyo s’est lancé dans la création de terrariums dans l’intention de reproduire à plus petite échelle ses écosystèmes favoris.

Dans son appartement situé au centre-ville de Calgary, on peut admirer des aquariums décorés de broméliacées et d’orchidées dans lesquels se déplacent des grenouilles colorées appartenant à la famille des dendrobates. Dans d’autres contenants en verre trônant chez lui, Indra a recréé les habitats naturels de son enfance, qu’il a passée dans les forêts pluviales d’altitude de l’Indonésie. Et ce ne sont là que quelques-uns des 30 terrariums autosuffisants qu’il a soigneusement imaginés et créés au fil des ans.

Il existe toutes sortes de terrariums. On peut planter quelques fougères dans un bocal en verre hermétique, ou encore reproduire une cascade dans un réservoir d’une capacité de 1 135 litres. À la base, le terrarium est un instantané de vie conservé sous verre dans lequel les amant·e·s de la nature tentent de recréer des processus caractéristiques des divers écosystèmes.

Concevoir un écosystème autosuffisant est complexe — il faut en effet reproduire dans un environnement fermé, artificiel, les processus que l’on observe dans la nature (précipitations, évaporation, décomposition, etc.) —, cela ne devrait pas pour autant dissuader les nouveaux·elles adeptes.

«Il y a des millions de façons différentes d’élaborer des terrariums. Il n’y a pas qu’une seule manière de faire: le meilleur moyen, c’est celui qui fonctionne le mieux pour vous», explique Indra.

Dans les dix dernières années, Mike Tytula, un amateur de reptiles basé à Toronto, a perfectionné sa propre technique. Il s’est ainsi spécialisé dans la création de vivariums, des terrariums qui sont spécifiquement conçus pour abriter des animaux en plus des végétaux.

Le passionné de reptiles admet qu’il n’est pas nécessaire d’être un·e expert·e pour se lancer. Il ajoute qu’on peut très bien créer un environnement sain pour une luxuriante variété de plantes sans avoir à ajouter des animaux, même si de nombreux·ses terrariophiles choisissent de le faire.

«Si vous croyez que votre premier terrarium sera parfait, détrompez-vous. Prévoyez plusieurs essais et erreurs. Il faut simplement faire preuve d’ouverture et avoir la volonté d’apprendre de nouvelles informations.»

Cet article a pour but de vous montrer comment concevoir votre propre univers végétal miniature. BESIDE s’appuie sur l’expertise d’amateur·trice·s chevronné·e·s pour guider son lectorat dans l’élaboration d’un terrarium bioactif ou autosuffisant (avec l’option d’y ajouter une ou deux grenouilles).

Concevoir un terrarium
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– 1 –
Créer un mood board.

Il peut être utile de regarder des photos et de demander conseil à d’autres architectes de terrariums pour déterminer le biotope que vous souhaitez reproduire, qu’il s’agisse d’un désert aride ou d’une forêt pluviale tropicale. Il n’est pas recommandé de chercher à recréer des habitats nordiques comme ceux du Canada, car de nombreuses plantes ont besoin de cycles d’hibernation pour s’épanouir et qu’il est difficile de reproduire ces conditions dans un terrarium. Pour cette raison, nous nous concentrerons ici sur la conception d’un environnement tropical, un choix populaire chez les terrariophiles.

– 2 –
Choisir un emplacement.

Pour un terrarium tropical, il vaut mieux opter pour un emplacement où la température n’est ni trop chaude ni trop froide. Une température trop élevée pourrait en effet éliminer l’humidité dont dépend l’écosystème. Il risquerait alors de s’assécher et vos plantes, de se flétrir. La plupart des amateur·rice·s choisissent d’installer leurs terrariums à l’intérieur.

– 3 –
Établir un budget.

Certains végétaux coutent cher. Selon les plantes sélectionnées et la taille et la complexité de votre création, il faut prévoir quelques centaines, voire quelques milliers de dollars pour la fabrication d’un vivarium bioactif. Établir un budget dès le départ permet de trouver des moyens de réduire les couts. Tissez des liens avec d’autres amateur·rice·s qui sont disposé·e·s à mettre en commun leur matériel ou à vendre des plantes à des tarifs réduits. Épargnez quelques dollars ici et là en donnant une nouvelle vie à de vieux moustiquaires, en achetant d’occasion les contenants en verre et en optant pour des végétaux qui sont en solde à la jardinerie locale.

– 4 –
Placer les plantes en quarantaine.

Les plantes sont parfois porteuses de maladies ou d’organismes nuisibles qui risquent de compromettre la survie de votre terrarium. Pour éviter ce genre de problème, dépotez les plantes et retirez la terre des racines jusqu’à ce qu’elles soient dénudées. Rincez et nettoyez soigneusement les plantes, puis faites-les tremper dans l’eau tiède de 10 à 15 minutes. Rempotez-les dans de nouveaux contenants que vous aurez d’abord remplis de substrat à terrarium et placez-les dans un récipient fermé vaporisé d’un peu d’eau (un grand Tupperware devrait convenir). Il est recommandé de mettre les plantes en quarantaine pendant un mois avant de les ajouter à votre terrarium.

Matériel
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  • Contenant en verre muni d’un couvercle et de trous d’aération
  • Lampe de croissance
  • Billes d’argile (ou gravier d’aquarium)
  • Substrat pour terrarium (prémélangé)
  • Toile en maille plastique ou toile moustiquaire
  • Débris de feuilles
  • Éléments de décor
  • Sélection de plantes
  • Collemboles et isopodes
  • Mélange de vinaigre et d’eau (ratio 1:1)
  • Ventilateur d’aquarium (recommandé)

Étapes
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– 1 –
Choisir un contenant

Les spécialistes recommandent d’utiliser un contenant en verre. Contrairement au plastique et à l’acrylique, qui peuvent être déformés par l’humidité, le verre est un matériel robuste qui peut être réparé avec du silicone.

Choisissez un récipient résistant à l’eau en fonction des plantes que vous souhaitez y mettre. Les contenants plus larges conviennent aux plantes qui poussent vers l’extérieur, tandis que les contenants hauts accueillent plus facilement les plantes grimpantes, comme les différentes variétés de vignes.

Pour créer un terrarium bioactif, vous aurez besoin d’un récipient hermétique, l’objectif étant d’empêcher les organismes nuisibles d’y pénétrer et les décomposeurs, de s’en échapper. Il faut aussi prévoir une forme de ventilation. Optez pour un contenant dont le dessus ou les côtés sont percés de trous d’aération de façon à empêcher que l’air stagne et que des moisissures se développent. Les ventilateurs d’aquarium, relativement abordables, peuvent faire l’affaire. Placez un ventilateur à l’extérieur, vis-à-vis d’un trou d’aération, pour contribuer au renouvèlement de l’air dans le terrarium.

Nettoyez le contenant avec un mélange de vinaigre et d’eau avant d’y mettre quoi que ce soit.

– 2 –
Créer une couche de drainage

Il est maintenant temps de créer la couche de drainage. Cette couche n’est pas essentielle, mais elle peut permettre de maintenir la santé des habitats à long terme en absorbant l’humidité, empêchant du même coup les racines de pourrir. Répartissez les billes d’argile au fond du contenant pour former une couche de deux pouces d’épaisseur (vous pouvez aussi utiliser du gravier d’aquarium ou des cailloux récupérés dans votre cour, mais, dans ce cas, le terrarium sera plus lourd).

Mesurez, découpez et superposez trois carrés de toile moustiquaire de façon à couvrir complètement les billes. La toile sépare la couche de drainage de la couche de terre (couche de substrat), ce qui permet un meilleur drainage.

– 3 –
Recouvrir d’une couche de substrat

C’est là que la magie opère! Le substrat est le milieu de culture dans lequel évolueront vos plantes. C’est donc la base de l’écosystème que vous êtes sur le point de créer.

Préparer un bon substrat n’est pas chose facile. Pour les novices, la meilleure solution est sans doute d’acheter un prémélange. Recherchez le substrat de type ABG, un classique auprès des terrariophiles.

Formez une couche d’un à trois pouces d’épaisseur sur la toile moustiquaire. Éparpillez ensuite une bonne quantité de feuilles mortes par-dessus le substrat (elles serviront de nourriture aux décomposeurs). Vous pouvez vous servir de feuilles récupérées dans votre cour, à condition que vous n’utilisiez pas de pesticides. Il suffit de les mettre au four pendant 15 minutes à 121 °C [250 °F] pour éliminer tout organisme nuisible.

– 4 –
Ajouter les organismes vivants et personnaliser le terrarium

Vous pouvez maintenant ajouter les plantes que vous avez choisies. Pour un terrarium tropical, optez pour des végétaux capables de supporter un taux élevé d’humidité. Les broméliacées, les plantes grimpantes et les fougères sont de bonnes options. Une fois qu’elles sont bien en place, le temps est venu de faire entrer l’équipe de nettoyage.

Pour que votre terrarium soit autosuffisant, il faut y ajouter des organismes qui décomposent la matière organique morte ainsi que des nutriments, et veiller à éliminer les nuisibles. L’idéal est de vous procurer des isopodes (cloportes) et des collemboles (des bestioles qui ont l’air d’insectes, mais qui n’en sont pas). Ajoutez des branches, des buchettes, des coquilles de noix de coco et d’autres éléments de décoration pour personnaliser votre terrarium.

– 5 –
Mettre la touche finale

Finalement, il est recommandé d’ajouter une lampe de croissance au-dessus de votre terrarium de façon à en réguler la température (luminaires pour dessous d’armoire ou lampes DEL). Pour un plus bel effet, privilégiez les luminaires ayant une température de couleur de 5 000 à 6 500K.

Si vous voulez ajouter des animaux à votre terrarium, sachez que les minuscules grenouilles à flèches (Ranitomeya) sont une bonne option pour les novices. Il faut cependant prévoir un aquarium dont les dimensions sont d’au moins 12 x 12 x 18 pouces. Il faut aussi aménager des cachettes et étaler une épaisse couche de débris de feuilles mortes. L’achat de grenouilles peut cependant peser lourd dans le budget: il faut en effet compter entre 40 et 80 dollars par individu, selon l’espèce choisie. Vous pouvez commencer avec une seule.

Vous voulez approfondir vos connaissances sur la conception de terrariums? Voici deux liens susceptibles de vous intéresser (en anglais) :

How to Setup a Bioactive Enclosure with, or without, animals

Vivariums – Everything You Need to Know (From the Ground Up)

Jade Prévost-Manuel est une journaliste canadienne dont les articles sont parus, entre autres, dans SUSTAIN Magazine, Outpost Magazine et sur CBC News. Quand elle n’est pas occupée à raconter des histoires sur la terre ferme, elle en profite pour explorer la vie sous la surface de l’océan.

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