Travailler au vert

Le greendesking, ou un bureau parmi les arbres.

Texte—Gabrielle Anctil
Illustrations—Joanna Ławniczak

Combien avez-vous dépensé en plantes d’intérieur pendant la pandémie de COVID-19? Quel que soit le montant, vous n’étiez pas seul·e. Selon un article du Guardian, certain·e·s fleuristes britanniques ont vu leurs ventes augmenter de 500% au cours de 2020. Besoin de compagnie ou d’air pur, désir d’agrémenter nos intérieurs d’un peu de dehors ou même de voyager par l’intermédiaire de plantes exotiques… Toutes les raisons étaient bonnes pour verdir nos maisons.

Et c’est tant mieux! Les bienfaits des plantes pour notre santé — physique et mentale — ne sont plus à prouver. De nombreuses études indiquent que le temps passé en nature améliore l’humeur et la capacité d’attention, diminue le stress et les risques de problèmes psychiatriques, et stimule l’empathie et la coopération. Plus encore: des recherches ont montré que le simple fait de regarder des images de verdure nous permet de nous sentir revigoré·e·s.

À l’heure où les enjeux de santé mentale font les manchettes, et à l’aube de notre retour au bureau, la question du bienêtre au travail est devenue incontournable. Et si la solution était de travailler hors les murs?

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Naissance d’un mode de vie
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«Allez travailler dehors!» C’était en substance le message envoyé par la section australienne de l’organisme The Nature Conservancy, en 2016, lors de la semaine «Work With Nature». Les travailleur·euse·s étaient encouragé·e·s à transporter leur bureau à l’extérieur pour au moins une heure chaque jour, au nom de leur santé.

Un an plus tard, de l’autre côté de la planète, l’organisme montréalais Îlot 84 reprenait la même idée sans le savoir, en créant Aire commune, un espace de travail extérieur dans le Mile End. «C’est après avoir mis sur pied l’initiative que nous avons découvert le concept de greendesking», se remémore Emilie Wake, cofondatrice de l’OSBL.

Depuis, le greendesking — l’acte d’accomplir un travail de bureau dehors, à la ville ou à la campagne — se répand à travers le monde, propulsé par la pandémie de COVID-19, qui nous a forcé·e·s à revoir nos manières de socialiser.

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Ouste, dehors
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Les grandes compagnies de la Silicon Valley sont de celles qui donnent du souffle à ce mouvement, et ce, depuis quelque temps déjà. En 2017, Microsoft offrait, à titre de salles de réunion, des cabanes dans les arbres à ses employé·e·s de Richmond, dans l’État de Washington. Deux ans plus tôt, Facebook dévoilait un toit vert de 9 acres, peuplé de 350 arbres et d’un sentier de 800 m, à Menlo Park, en Californie.

Cependant, pas besoin d’être un·e travailleur·euse branché·e du milieu de la tech pour profiter des avantages du greendesking.

À Montréal, Îlot 84 lançait récemment une nouvelle initiative: une vingtaine de cabines de télétravail extérieures, disséminées un peu partout dans la ville et offrant gratuitement des prises de courant et un accès internet.

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Ces «ilots d’été» viennent pallier le «manque d’aménagements adaptés» pour les télétravailleur·euse·s souhaitant sortir — au sens littéral — de leurs quatre murs, lit-on dans le communiqué de presse.

Au Royaume-Uni et en France, la mode est plutôt au télétravail rural. De nombreux espaces de coworking s’installent le long des lignes de train pour offrir aux urbain·e·s un bureau loin du brouhaha des grandes villes. L’entreprise britannique d’espaces de coworking Hatchery a même restauré une zone humide à proximité de ses locaux — comme quoi notre intérêt pour la nature mène à des effets concrets. «Ce n’est pas parce qu’on travaille à la campagne que c’est forcément du greendesking, tempère Emilie Wake. On a certainement des bénéfices à être à proximité de la nature, mais il faut se trouver à l’extérieur pour percevoir les odeurs, les sons, le vent.»

Le greendesking est là pour de bon, croit-elle.

«Au début des années 2000, on parlait des horaires flexibles comme d’une grande innovation. Après la pandémie, c’est le lieu de travail qui devient flexible.»

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Son organisme œuvre déjà à répandre ses ilôts ailleurs au Québec, notamment pour attirer les travailleur·euse·s en région.

Mais en fin de compte, il nous suffit de prendre un appel en marchant ou de transporter notre ordinateur au parc pour nous initier au greendesking. «On comprend désormais qu’il est important de passer du temps dehors», se réjouit Emilie. Il ne reste plus qu’à intégrer cette bonne habitude dans notre quotidien.

Gabrielle Anctil est chroniqueuse et recherchiste à la première chaine de Radio-Canada. Le reste du temps, elle écrit pour divers médias, dont Continuité, Unpointcinq et la Gazette des femmes. Été comme hiver, on la trouve, rayonnante, sur sa bicyclette.

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